Chaque année, autour du 15 octobre, les ornithos entreprennent le Tour Courbet Est pour dénombrer les éléphants de mer, les colonies de manchots papou, et baguer les jeunes albatros hurleurs. Pour cette manip, Pierrick et moi nous sommes armés de 2 manipeurs de choques : Mathieu (Gener) et Lise (Ecobio). Le tour se fait bien entendu en plusieurs étapes :
Etape 1 : PAF – Cataractes
Nous partons à 7h00 de PAF, direction Cataractes à travers la péninsule Courbet. Le soleil est au rendez-vous pour cette traversée. Paysage très caillouteux et parfois souilleux. Mathieu en a fait les frais 2 fois... Merci Mat pour ces moments de rigolades intenses !
Ensouillage en règle de Mathieu
Lise
Quasiment pas de vent, du soleil, nous avons trop chaud en marchant et les couches tombent. Rien à compter jusqu’à Cataractes…mis à part les cailloux mais on laisse ça aux géologues !
Arrivées à destination, nous posons les sacs à la cabanes et nous allons chercher les quelques nids d’Albatros côté Anse Betsy.
Etape 2 : Cataractes – Cap Cotter
Levés aux aurores, nos compteurs commencent à crépiter gentiment, et les pinces à baguer servent sérieusement. Pour cette 2nd étape, Mathieu et Pierrick prennent l’intérieur des terres tandis que Lise et moi suivons la côte. Nous nous chargeons donc de compter les éléphants, les papous et baguer les jeunes Albatros proches de la côte. Le plus dur reste de quitter la côte quand le GPS nous indique un nid d’Albatros à plusieurs centaines de mètres dans les terres, et de reprendre nos comptages à l’endroit où nous l’avions quitté ! Tout ceci fait qu’on réalise beaucoup plus de kilomètres que la normale ! Pour une étape comme celle-ci qui en marchant normalement ne prend pas tant de temps que ça, nous arrivons à la nuit, perdus dans le brouillard et l’immensité plate du Nord Courbet. Heureusement que le GPS nous guide !
Jeune albatros hurleur sur son nid (en arrière plan le mont Campbell)
Etape 3 : Cap Cotter – Cap Noir
Une des plus courtes étapes…mais cette fois, Lise et moi avons 65 nids d’Albatros à visiter. Lors du départ de la cabane à 6h00, la pluie tombe à l’horizontale. Courage, il faut y aller !
Pour les Albatros, la technique est simple : on s’approche doucement du rejeton de plus de 10 kg, on passe la main au dessus de sa tête et lorsqu’il ne s’y attend pas (mais vraiment pas…), on attrape son bec redoutable avant d’enlacer son corps d’un bras pour ne pas qu’il ouvre ses immenses ailes ! Lise est d’ailleurs passée maitre dans cet art ! Aucun loupé !
Capture d'un jeune alabtros par Lise...Ne pas oublier de tenir le bec !
Reste plus qu’à lui mettre une belle bague en métal autour de la patte. En gros, c’est comme si on lui donnait des papiers ! Ca lui fait une belle jambe !
Le temps se découvre quelques peu à la mi-journée. Plus agréable pour courir de point en point, surtout quand ces points ne sont pas dans l’ordre (et oui, il a fallu faire demi-tour de temps en temps pour aller chercher un nid), ou que certains nids ont été trouvés à plus de 3 km dans les terres ! Arghh !
Lors d'un baguage, maman et papa étaient près de leur poussin ! Ici maman en gros plan
Etape 4 : Cap Noir – Ratmanoff
AH ! On s’en souvient tous de cette étape. Plusieurs images restent gravées : des colonies de Papous immenses cachées dans la végétation, des plages couvertes d’éléphants de mer à n’en plus pouvoir…et la méthode des doubles compteurs. Les 2 compteurs comptent séparément un groupe et comparent leur nombre. S’il y a plus de 10% de différence, on recommence ! En gros on se demande si tout ça n’est pas une vaste blague du labo ! Non…c’est sérieux ! En plus, nous n’avons pas qu’un compteur chacun, car il faut différencier : les femelles éléphants de mer, les Pachas des harems, les mâles périphériques, les Papous sur œuf, ceux sur poussins, le nombre total de papou de la colonie, et enfin les poussins en crèche…Ouuff !
Plage estivale bondée...comme en méditerranée l'été !
Le comptage !
Sur la route, nous assistons à quelques batailles entre Pachas pour la conquête des harems de femelles
C’est parti, les compteurs crépitent furieusement toute la journée jusqu’à la tombée de la nuit, au rythmes des passages de grains (neige roulée dure) et de belles éclaircies. Malheureusement, et malgré un départ aux aurores, nous n’arrivons pas à Ratmanoff avant la nuit. On décide donc de rentrer à la cabane de guetteur. On y retrouve avec joie Pacha (Guillaume) et Bonbon (Adrien), 2 stagiaires du labo de Chizé travaillant sur les éléphants. Ils sont tous les 2 arrivés en août à l’OP2 et repartis à l’OP3 dernière. Ils nous ont réservés un accueil de rois !
Pacha. C'est la trompe gonflée des mâles en période de reproduction qui leur a valu
le nom d'éléphant de mer. Elle lui sert de caisse de résonance lorsqu'il éructe
Le lendemain, nous restons à Ratmanoff pour terminer le boulot. On se repose un peu et on a l’occasion de découvrir le travail de Pacha et Bonbon à Rat. Ils suivent plusieurs harems qu’ils dénombrent chaque jour. Ils marquent des bonbons (jeunes éléphants) à la naissance, pour les suivre jusqu’au sevrage 3 semaines plus tard. Les bonbons font environ 30 à 40 kg à la naissance. Au sevrage, ils sont 3 fois plus lourds ! Une des croissances les plus rapides dans le règne animal ! Lorsqu’on les quitte le lendemain matin, ils s’apprêtaient à poser des balises sur les femelles avant leur départ en mer…
Femelle et son petit, le bonbon. Ils sont nommés ainsi car les orques raffolent
de ces petites boules de graisse plutôt naïves...une vraie friandise pour eux !
Un harem proche de Ratmanoff
En octobre, on retrouve les manchots royaux qui commencent à rentrer à terre pour muer. Ceux dont le poussin a survécu à l'hiver mueront en début d'année prochaine, une fois que leur poussin sera apte à se débrouiller seul.
Etape 5 : Ratmanoff – Morne
A l'aube, nous partons compter et les royaux partent pêcher
Il faut déjà quitter nos hôtes. Mathieu et Pierrick file baguer les quelques Albatros dans les terres pendant que Lise et moi s’attaquons aux colonies de Papou du sud Ratmanoff. Tôt le matin, le temps est gris, plafond bas, mais il n’y a pas un pète de vent ! Cela ne pouvait annoncer qu’une tempête que nous avons eu dès le milieu de la matinée et jusqu’à la fin de journée. Vents violents d’Est avec neige fondue. Même la meilleure des Goretex n’y résiste pas ! Nous arrivons donc à cabane trempé avec une couche de neige collée sur tout le côté gauche. Dur mais mémorable !
Une autre photo du levée de soleil à Ratmanoff, on ne s'en lasse pas !
Etape 6 : Morne – Pte Suzanne
Nos manipeurs émérites nous quittent. Ils rentrent à PAF. Pierrick et moi poussons jusqu’à Pte Suzanne. Etape longue. Il faut faire le tour de la baie Norvégienne. Encore une fois nous arrivons à la nuit, mais cette fois, tous les comptages sont faits ! Le rythme est simple : arrivée à 20h, 20h30 le plat de pâte est englouti, 20h40 au lit, le réveil programmé à 4h00 le lendemain matin.
Manchots papou. Contrairement aux royaux, ils pondent jusqu''à 2 oeufs et couvent couchés
A la mi octobre, la plupart des poussins de papou sont nés
Rencontre peu banale, un manchot papou mélanique (=noir). Particulièrement élégant non ?
Etape 7 : Pte Suzanne – PAF
Enfin, le beau temps est de retour pour la fin. Nous rentrons à PAF tout en comptant les nombreux éléphants de mer sur l’Isthme bas. Quelques colonies de Papou restantes, et nous arrivons à PAF, le soir, à l’heure pour l’apéro ! Il nous faudra une bonne nuit pour récupérer de la fatigue accumulée !
Pacha ayant gagné son combat. Leur cou sont souvent bardés de cicatrices anciennes et récentes, stigmates de combats acharnés
Les droits du vainqueur...mais toujours un oeil sur les mâles périphériques prêts à lui voler ses privilèges.
Etape 8 : PAF – Pte Molloy
Dernière étape sympathique sous un temps magnifique. Anne-Claire (Bibou) et Audrey (Geophy) nous accompagnent. On a même la chance d’être récupéré à Molloy par le chaland. Sur le retour, un groupe de plus de 80 dauphins de Commerson nous suivent ! Spectacle magique que de les voir jouer dans les vagues du chaland ! Voici quelques échantillons à vous faire partager :
Bilan de cette manip de la mort : fatiguant et un peu frustrant car peu de temps pour s’arrêter et observer. Nous avons donc fait en 8 jours quelques 250 km, compté 45 000 éléphants de mer et 55 colonies de Manchots Papou (10 000 individus) et bagué près de 200 jeunes Albatros Hurleurs.
Bravo ! Tes photos sont toujours aussi belles, la météo est toujours aussi changeante, mais je vois que tu as été formé à bonne école pour la décrire ;) Bonne continuation !
RépondreSupprimerQuel travail! toutes ces belles photos et ton reportage me font rêver.
RépondreSupprimerBonne fête de Noël Alexis!
Superbes photos comme à ton habitude...
RépondreSupprimerUn détail me turlupine : 250 km en 8jours tout en plaquant des albatros!!!
tu vas nous mettre la misère pour la traversée de La Réunion!
Bises et Bonne Année Alex.